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FERME DISTILLERIE NORTHMAEN - FAFNIR

 

Et si on restait « presque » à la maison en cet été « ensoleillé » et laissions un peu reposer ce brave BRAD PEAT qui est fatigué de ses voyages virtuels et spatiotemporels (mes lecteurs savent de quoi je parle). Nous allons juste aller faire un tour en Normandie pour découvrir la Ferme Brasserie/Distillerie THE NORTHMAEN et son whisky FAFNIR.

 

Mais avant tout un peu d’histoire.

 

Comme tout le monde le sait (surtout si vous êtes fan de Ragnar Lodbrok et de la série Viking), entre le 9ème et le 10ème siècle, notre beau pays a connu quelques incursions plus ou moins longues des méchants vikings venus du nord. Certains ont dû trouver le climat beaucoup plus clément que dans leur pays car ils sont restés chez nous et se sont établis sur les rives de la Seine. Aller, j’arrête car on n’est pas là pour parler d’histoire mais de whisky français.

 

Quoi qu'il en soit, sans eux, je ne suis pas certain que mon petit tour ne se fasse en NORMANDie ! Et surtout je ne suis pas certain que je vous parlerai de cette ferme brasserie du pays de Bray. En effet, c’est un peu grâce à eux que les recettes de bière à base d’orge ont vu le jour (à l’époque où on ripaillait à la cervoise dans le coin). Sköll !   

 

 

Bref, il n’empêche que si l’on cherche bien dans les arbres généalogiques, je suis quasi-certain que on va trouver des racines vikings à Dominique Camus que nous allons rencontrer aujourd’hui dans sa ferme de La Chapelle Saint Ouen, par Odin !

 

 

C’est par un après-midi magnifiquement…pluvieux (comme l’été nous en donne de beaux en ce moment), que je pose BRAD PEAT à côté d’un vieux bus à impérial sous sa bâche. Je suis à la ferme et suis entourés de champs d’orge. C’est bien le bon endroit.

 

En entrant dans le bâtiment dont les murs orangés se détachent bien sur le fond…gris du ciel, point de drakkar ni de boucliers en bois (quoique dans un coin, j’en ai vu un), mais des cartons de bouteilles de bière. Et oui, ici on parle beaucoup de bière car la maison est connue pour en produire plus d’une quinzaine depuis 1997. Et comme on sait de la bière au whisky il « n’y a qu’» un coup de chaud et quelques années d’attentes !

 

 

Arrive alors Dominique. Que l’on ne se méprenne pas, bien que d’origine Viking (j’en suis certain), il ne fait pas 2 m 10 de haut, ne porte pas de moustaches pendantes, ni n’a le visage couvert de tatouages. Pourtant, il doit bien avoir la force des hommes du nord pour être partout à la fois comme c’est le cas !

   

Avant de gouter à son whisky fumé au bois de hêtre, il me fait faire le tour de la propriété. La production reste artisanale, mais il dispose malgré tout de 3 stocks de fûts (et bientôt 4). Ses fûts de chênes ayant auparavant hébergé du vin rouge (brulés et grattés), dorment en attendant leur heure dans une cave sèche et deux caves humides qui sentent bien le champignon. On trouve aussi dans un coin des fûts en acacia ancien contenant de Sauternes (pris en l’état sans être brulés pour garder tout la sucrosité du Sauternes).

 

 

Il m’explique qu’il gère la production de la graine d’orge plantée autour de la ferme, à la goutte de « new make » qui sort de l’alambic (seule son orge est maltée soit en Belgique soit en Allemagne pour le whisky que nous allons goûter aujourd’hui, mais c’est SON orge). C est d ailleurs l’occasion de gouter à celle gorgée des effluves de fumée de bois de hêtre (base du whisky en dégustation dans ces lignes).

 

Ce chimiste de formation me présente ensuite l'honorable alambic en continue ambulant avec lequel il produit son whisky depuis le début des années 2000 (ce qui au passage le fait faire partie du club fermé des plus anciens distillateurs français). La ligne d’embouteillage est située juste à côté. Comme quoi le normand dit vrai puisque tout le processus de fabrication est là : j’ai vu les champs, les sacs de grain et l’alambic !

 

 

Avant de passer à la dégustation de notre FAFNIR (nain cupide transformé en dragon dormant sur son or dans la mythologie scandinave –NDLR-) sachez qu'à la ferme (et ailleurs) on peut apprécier de belles choses comme le déjà légendaire et mielleux 3 ans d’age THOR BOYO (médaille d’or au concours général agricole en 2017) et son puissant ainé de 10 ans d’age sorti en BRUT DE FÛT (à 53 % d’alc).

 

On trouve également le 8 ans d’âge SLEIPNIR (vieilli dans la fameuse cave humide) et le très surprenant et boisé KENNING (qui a passé 6 ans dans des fûts de Sauternes en acacia).

 

 

Celui qui nous intéresse aujourd’hui, amateurs de whiskies fumés (et tourbés) est le FAFNIR, n’est donc pas tourbé mais « hêtré » (je sais je viens de créer un nouveau mot, j’appelle de suite l’academie, mais c’est le cas puisqu’il est fumé au bois de hêtre –NDLR-).

 

Il a passé 5 ans en cave sèche dans des fûts de chêne ayant auparavant hébergé du bordeaux rouge, ce qui lui donne une couleur dorée / cuivrée (il a pris la couleur de l’or du dragon qui a son nom !). 

 

Whisky FAFNIR

Alors ce fumage au hêtre ça donne quoi ?

 

Le nez de loin va d’abord croire à une odeur orangée et caramélisée.

 

Mais au premier vrai passage dans le verre, il découvre une odeur de céréale et de miel (qui fait un peu la marque de la distillerie) mais accompagnée de légères effluves de fumée d’herbe verte. La chaleur du miel est contrebalancée par la fumée fraiche. On note une présence soutenue d’épices qui viennent chatouiller le nez.

 

Le coté boisé reste au second passage mais laisse un peu plus de place à la céréale et surtout aux épices.

Au troisième passage on va trouver une odeur caramélisée mais également celle de la fumée de hêtre.

 

Pour autant, et de manière globale, l’odeur de fumée est discrète et reste assez en arrière-plan (beaucoup moins présente que ce qu’on pourrait ressentir avec un whisky tourbé où elle sera plus ronde).

 

Dans le creux de la main, on va retrouver l’odeur de l’orge torréfiée et un pointe tanique du fût de vin.

 

 

En bouche on va tout d’abord avoir un goût d’amande et de compotée de pomme caramélisée dans un feu de cheminée.  La fumée vient apporter un peu de fraicheur mais également d’amertume. Amertume qui s’atténue mais qui reste en bouche alors que passent les épices (bien prononcés au palais) et le miel (moelleux). Sans en être rendu désagréable, je vous rassure, ce goût va donner à ce whisky son originalité mais également des allures de jeune distillat (alors qu’il a quand même 5 ans), ce que le nez ne montrait pas.

 

Il va néanmoins se densifier et devenir de plus en plus moelleux en le gardant en bouche et laisser même ressortir la fin du feu de bois de hêtre avant de l’avaler.

 

C’est ce que Dominique Camus appelle le « fumé normand ».

 

La finale est assez courte mais est marquée par le retour des épices au bout de quelques secondes.

 

Le verre vide laisse place à l’orge sur pied dans son champ et aux notes phénoliques. 

 

 

Ce whisky (et cette distillerie) sort son épingle du jeu sur les terres où le calvados est roi avec une originalité assez peu souvent rencontrée.

 

Si vous voulez aller faire un tour à la ferme n’hésitez pas, Dominique vous fera faire le tour du propriétaire (les samedis ! 😉) et vous fera goûter à ses bières, cervoises et whiskies !


Et pour les plus fêtards amateurs d’épopées viking, je vous conseille de faire un tour en juin à la NORTH’FEST qui a lieu dans le jardin de la ferme. On y écoute de la bonne musique, on y pratique les sacrifices (non je rigole), on y fait bruler des buchés et surtout on y boit de la bonne bière normande ! 

 

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