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ABERLOUR A'BUNADH BATCH #61

Par une belle journée écossaise, nous étions Sebh (pour l’anonymat) et moi perchés sur nos fières montures (à deux roues) et roulions sur l’A95 en plein au milieu des Highlands entre Graigellachie et Ballindaloch. La dernière cote avant le pont de Graigellachie avait été fatale au reste de la troupe et nous étions plus que tous les deux à la recherche de l’église fantôme.

 

Imaginez, depuis le matin, le rêve de tout amateur de whisky sur moins de 25 miles, une route longeant des noms comme Benriach, LongMorn, Speyburn, Glen Grant, Glenrothes, Graigellachie, Macallan et devant nous un programme comme Dailuaine, GlenAllachie, Glenfarclas (et je garde sous silence des Knockando et autre Glenlivet) : la route des 100 drams qui pour l’instant c’était passée sans drame !

 

Sur notre petit nuage, nous étions en train de discuter paisiblement de réincarnation tout en pédalant. Mon ami était en train de me faire part de son souhait de se réincarner en Alain Chabbat (fin homme de lettre français –NDLR-) quand un bruit étrange se fit entendre de ma roue avant ! « Bualadh doirbh » m’écriai-je ! (coup dur en français) : la crevaison. Bien entendu nous n’avions rien pour réparer car avions optimisée la place de nos sacs pour glaner le plus de bouteilles possible lors de différentes dégustations de distilleries.

 

Obligés de mettre pied à terre, nous nous sommes lancés à la recherche d’un atelier où une âme charitable nous aiderait. Ainsi, sur cette route magique, au détour d’un virage, nous sommes très vite tombés sur un bâtiment ressemblant à un petit château de pierres grises avec son petit donjon.  Bien évidement ce bâtiment n’était autre que la porte d’entrée d’une….nouvelle distillerie. Mais pas n’importe laquelle : ABERLOUR !

 

 

Sur cette route magique, même une crevaison donne du baume au cœur.

 

Nous toquons à la porte et tombons sur Bill Gordon, qui nous fait rentrer dans le visitor center alors même que ce dernier venait de fermer. Quel bel endroit : des bouteilles des plus rares, des fauteuils club, une cheminée… . Le rêve continue mais la réalité reprend le dessus. Nous lui avons fait part de notre mésaventure et, comme tout bon écossais, il nous a proposé de nous accompagner vers l’atelier pour réparer notre roue.

 

 

Nous sommes ainsi allés plus en avant dans la distillerie. Ce n’était qu’un dédale de vieilles bâtisses en pierres grises, de toits pagodes et de grands bâtiments industriels (on est quand même chez Aberlour), le tout orné de portes peintes en rouge.

L’atelier était situé au milieu des bâtiments. Équipé ce ne fut qu’une formalité de réparer notre roue.

 

Juste à côté de l’atelier un nouveau bâtiment noirci et une nouvelle porte rouge sur laquelle est noté « Wharehouse n°1 » : il doit se passer des choses la dedans !

 

Bil Gordon, a remarqué nos regards et nous a dit vous voulez entrer pour un petit Dram avant de repartir ? On aurait dit qu’il nous connaissait.

 

Dans le bâtiment bien entendu ce n’était que des fûts flanqués des inscriptions ABERLOUR-GLENLIVET – STRATHSPEY (il doit y avoir de belles choses là-dedans !). Bill nous a dit :  « vous voulais gouter lequel ? » Le rêve !

Face à nous un fût Oloroso numéroté 61 ! Nos regards se sont croisés et nos esprits se sont envolés vers une magnifique expérience vécue en 2010 lors du whisky live au Palais de Tokyo : un fût d’A’BUNADH ! Ce fut notre choix :  il devrait nous permettre de nous remettre sur les roues (ou pas !)

 

Le taste-vin a plongé dans le fût et a versé dans nos verres un liquide couleur d’ambre typique de sa finition. Notre choix était validé.

 

 

Certes l’A’BUNADH est déjà un cask strenght, mais tout juste sorti du fût, il déclenche une émotion encore plus grande. Nous frémissons au moment de glisser nos nez dans les verres remplis de ce qu’il est communément nommé un sherry bomb.

 

Tout était là : la puissance et la gloire !  Presque 61° de plein fouet ! Comme disait Michel Audiard (réalisateur de cinéma français) et sans aucun sexysme : « faut quand mêm’ r’connaitre que c’est plutôt une boisson d’homme ! »!

 

En dégustation, c’est tout d’abord les arômes amers du chocolat noir et de la réglisse qui apparaissent et nous tapissent le nez. On se croirait presque dans une brulerie en pleine torréfaction.  Une fois repris ses esprits et un peu d’air pur, c’est les fruits qui arrivent quand le nez replonge dans le verre : oranges, fruits rouges du sherry et même douceur de figue. On a envie de faire durer ce plaisir olfactif. Nous ne sommes pas déçues par les arômes de cannelles et de vanilles qui apparaissent lors d’un troisième passage ! Mais qu’elle expérience qui se reproduit à chaque fois et quelle palette d’odeur dans un si petit verre.

En bouche, la donne fût la même mais chamboulée, inversée : le palais quelque peu endormi par la puissance de l’alcool, est tout d’abord envahi d’épices. Vient ensuite le tour des fruits avec une belle présence d’orange et de mure. Enfin juste avant d’avaler le liquide apparaît le chocolat noir et presque la fumée !

 

Le souvenir qui nous est resté en bouche fut très long. Il magnifie cette dégustation en laissant en bouche de beaux arômes de fruits, de sucre, de vanille, de miel.

 

Certes ce whisky est fort et puissant, mais il est la preuve que la marque ABERLOUR n’est pas à prendre à la légère (même si elle a tendance à être banalisée par une large commercialisation). Elle touche ici à l’excellence en termes de finitions en fût de sherry et fait de ce whisky une véritable référence.

  

 

Après un long moment passé en sa compagnie, nous avons remercié notre hôte pour cette belle expérience et nous nous sommes préparés à repartir sur la route 95. L’objectif à atteindre avec l’esprit rêveur mais aussi un peu embrouillé : essayer de retrouver nos amis afin de leur dire une nouvelle fois qu'avec l’A’BUNADH, c’est comme quand on met du PICON dans de la bière, il se passe des choses bizarres et inexplicables.

 

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