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NC'NEAN Batch 3

De nos jours de plus en plus de distilleries intègrent l’environnement dans leur processus de fabrication.

 

On sait depuis longtemps que les drèches sont des friandises pour le bétails environnement les distilleries, mais, de plus en plus, une démarche écologique plus large est intégrée dans la production de spiritueux.  

 

Aujourd'hui nous allons goûter à la plus bio des bios : NC'NEAN.

 

 

Des barons du whisky comme ABERLOUR (déjà à la pointe en termes de purification de l’eau depuis les années 30) privilégient l’approvisionnement en circuit court. A coté de ça, des distilleries plus jeunes comme ARDNAMURCHAN, dont nous avons déjà beaucoup parlé ici (du groupe ADELPHI) et Dalmunach (du groupe Chivas brothers) vont, elles, utiliser des énergies entièrement renouvelables (hydroélectricité et chaudière biomasse), pour la première, ou privilégier du matériel à haut rendement énergétique pour faire des économies, pour la seconde. En France, également, des distilleries comme Domaines des Hautes Glaces et Distillerie du Vercors, ou, en Irlande, Waterford produisent à partir de matières premières bios.

 

Néanmoins, peu se positionnent comme des distilleries 100 % écologique et ne se targuent de n’avoir aucun impact carbone comme celle d’aujourd’hui.  

 

 

En Ecosse, donc, une nouvelle venue sur la côte ouest en fait, depuis 2017, clairement son « cheval de bataille » : il s’agit de la distillerie NC’NEAN (prononcez le comme vous voulez –mais a priori c’est Nec-ni-an en français dans le texte). Nous allons goûter le BATCH 3 aujourd’hui.

 

 

Pour rejoindre la distillerie, la route n’est pas la plus simple. En effet, la distillerie est bien retirée sur la côte ouest de l’Ecosse sur une des rives du bras de mer qui sépare le pays de l’Ile de Mull (patrie colorée de TOBERMORY et de LEDAIG que nous avons eu l’occasion de vous faire découvrir à de nombreuses reprises). Pour faire honneur à Dame Annabel Thomas, maitresse des lieux, je choisis de ne pas trop jouer la provoque avec mon combi pétaradant (désolé BRAD PEAT aujourd’hui tu restes au port) et rejoins les lieux en vélo !

 

 

C’est donc par une belle route côtière que, longeant d’un côté le détroit et de l’autre les forêts, je commence mon périple. Presque arrivé à Drimnin, je quitte la départementale et rentre dans la forêt sur un chemin de terre. Elle est de plus en plus dense et sombre. Les alizés se faufilent entre les arbres et donnent parfois l’impression d’entendre des chuchotements dans les arbres. Bizarre et pas des plus rassurant !

 

 

 

Au bout d’un moment, la vie de la forêt semble laisser place à plus de clarté, des clairières et des maisons ! Un panneau me le confirme enfin, me voici enfin devant les tours de la distillerie « château » NC’NEAN ! Le moins qu’on puisse dire c’est que faire du bio rime clairement ici avec ne pas être en ville !

 

 

Une fois sur place, je fais la connaissance d’Annabel Thomas (ancienne londonienne qui a quitté le tumulte de la capitale anglaise pour la nature écossaise verdoyante).

 

 

Je raconte mon périple et lui parle des bruits de la forêt. Sans aucune surprise, elle me dit que ce n’est pas le vent mais que c’est simplement la déesse Neachneohain (qui se prononce aussi Nec-ni-an en français dans le texte –tiens tiens !!) qui, en bonne reine des lieux, veille sur les esprits qui habitent dans les bois. Elle me dit également que c’est en son honneur, et, parceque c’est une farouche protectrice de la nature, qu’elle a choisi d’appeler la distillerie BIO de la sorte (ah aussi il me semblait bien !!).

 

 

La vue imprenable de la distillerie est magnifique. L’ile de Mull se dévoile pleinement.

 

Avant même de rentrer dans les locaux, je me rends compte qu’une place de choix est laissée au maîtres de lieux : les deux alambics. En effet, ces deux dodus cuivrés passent leurs journées à admirer le paysage derrière leurs baies vitrées.

 

Le sujet central des lieux, le whisky (et le gin –NDLR-) rime ici avec la protection de l’environnement et le souhait d’avoir une empreinte carbone la plus faible possible. Avant même de me lancer dans la visite, je me rends compte qu’Annabel et son équipe semblent intarissable au sujet du ZERO EMRUNTE CARBONE (heureusement que je suis venu en vélo !).

 

Elle commence par me montrer le réservoir naturel qui jouxte la distillerie. Elle me dit qu’il a été créé afin de récolter les eaux de pluie (il ne pleut pas trop pourtant en Ecosse) et les laisser tranquillement se refroidir naturellement pour pouvoir être utilisées en circuit fermé pour les refroidisseurs du distillat.

 

En retournant vers la distillerie, elle me parle ensuite de l’eau du distillat qui provient directement de la source locale. 

 

 

 

 

Une fois à l’intérieur, au moment où nous nous dirigeons vers la salle de production, le temps semble se ralentir bizarrement.

 

Alors qu’Annabel s’apprête à me parler de ce qui fait une de ses fiertés (ses levures chéries), je lui fais part de mon ressenti. Elle me dit que cela est normal, car le temps s’adapte ici au très long et lent cycle de production. En effet, pour produire son distillat, elle a choisi de faire broyer son orge, bien reposée, lentement, de laisser ses bières fermenter au contraire longuement (114 heures) et même de d’allonger au maximum le temps de distillation pour obtenir le distillat le plus pur. Belle philosophie. 

 

 

Devant les deux whashback, elle me parle ensuite du long et fastidieux travail d’analyse qu’elle a réalisé en compagnie du Dr Jim Swan (chimiste et biologiste qui faisait partie de l’aventure initiale mais qui est décédé depuis) sur les levures qu’elle utilise pour produire son jus (afin d’obtenir une bière des plus savoureuses).

 

 

Elle me laisse ensuite dans les mains de Gordon Wood, le manager de la distillerie qui me présente les deux alambics de la maison. Avec leur col de cygne, qui les fait ressembler à des alambics normaux, eux aussi sont passés sous le couperet de l’écologie.

 

En effet, ils tirent leur chaleur d’un chaudière biomasse (qui utilise donc les résidus du bois comme combustible) qui fait clairement la fierté des lieux. En plus celle qui chauffe ici utilise des copeaux d’arbres des forêts environnantes (circuit court donc) avec un principe d’un arbre coupé, un arbre planté.

 

 

C’est Gordon qui va me parler de l’orge utilisé ici. Il est bien entendu bio et écossais et a été choisie pour un rendement certes limité mais pour un apport gustatif plus important. Il paraît désabusé quand il me dit que le relief de la région et l’humidité locale ne permettent pas de le cultiver dans le coin, et les obligent à recourir à 10 producteurs (éco-durables bien entendu) de la côte est du pays.

 

Mais, il me rassure de suite en me disant qu’il y a compensation afin de réduire l’emprunte carbone de leur transport. Il me dit ensuite que bien évidement (on s’en serait douté) les résidus de production finissent leurs vies soit dans les champs avoisinant comme engrais (pour les liquides) ou dans le ventre des vaches locales (pour les drèches).

 

 

Il m’accompagne ensuite vers les aires de stockage où dorment des fûts de différentes tailles : Ex bourbon, vin rouge et même sherry. Là aussi, il me coupe l’herbe sous les pieds (comme on dit même si ce n’est très écolo), il me dit que là aussi, il y a compensation carbone.

 

Concernant les fûts de vin rouge, il me parle de fût STR (Shave, Toast, Re-charred –procédé mis au point par le Dr Jim Swan).

 

Il me dit que ces fûts qui sont grattés (pour enlever les résidus de vins rouge et lui redonner un impact proche du neuf mais avec un fonds vineux), toastés (grillé aux copeaux) puis brulés une nouvelle fois (pour libérer le maximum d’arômes), permettent au distillat de bénéficier d’un double vieillissement entre un effet fût de vin et un autre fût neuf (boisé et épicé).

 

Manifestement ce n’est pas la peine de chercher ici on est ZERO IMPACT (NET ZERO comme on dit !). Il finit même par me dire que les bouteilles, qui ressemblent à des flacons de créateurs de mode qu'à une simple bouteille de whisky (à noter au passage que la dite bouteille vient d'être couronnée à l'IWSC pour son design), arborent fièrement le terme ORGANIC sont, elles mêmes, conçues à partir de verre recyclé. Je ne vous parle pas du graphisme, de l'étiquette, de la colle, également écoresponsable mais ici on pousse même la réflexion jusqu’à avoir un tarif différent selon que l’on prenne ou non, le tube qui l’accompagne !! 

 

NC'NEAN BATCH 3

Alors c’est bien tout ça mais quand est-il de notre BATCH 3 du jour ?

 

Ce distillat fait partie de la gamme de 8 batchs de la distillerie. En effet, après un premier et très limité AINNIR, il a été proposé 7 batchs produits entre 2017 et 2018 qui ont été commercialisées à partir de 2020 (à leur 3 ans). A noté qu’à l’heure où vous lisez ces lignes un mystérieux nouveau venu, le QUIET REBELS est positionné sur les étals des cavistes (avis aux intéressés ici).

 

Le N°3 que nous allons goûter date de l’été 2017 et a été embouteillé après avoir passé un peu plus de 3 ans dans les fameux fûts de vin rouge STR (majoritaire) ou dans des fûts de bourbon.  

 

 

La belle bouteille en verre recyclé légèrement verte masque quelque peu un distillat couleur or proche de la couleur d’un miel d’acacia.

 

Quand le nez plonge dans le verre, il va découvrir de la douceur et des fruits. Les aromes vont être très fruités et frais presque médicinales.

 

Au premier passage, sans aucune agressivité, le nez relève des notes de fruits du verger (poire et pèches). En insistant dans cette douceur, les arômes vont être de plus en plus sucrés avec même sur la fin une pointe de fraise tagada.

 

Au second passage, la fraicheur reste de mise avec une odeur d’anis étoilée et une odeur de menthe poivrée sur un fonds d’orge.

 

Au troisième passage on peut détecter une pointe de souffre et d’épices douces en insistant dans le verre. Paradoxalement le signal de lancement de la dégustation va se faire avec une pointe de réchauffement sur la fin avec l’odeur d’un gâteau vanillé sur la fin.

 

La prédominance de vieillissement fût de vin n’est pas la plus marquée à part sur la fin. Peut-être que la méthode STR mérite un passage plus long pour marquer le distillat avec des notes vineuses.

 

De manière assez surprenante dans le creux de la main on croirait détecter une pointe de fumée et de caoutchouc derrière l’orge (certainement liés au deux chauffes du fût).

 

Aller on goûte ?

 

Quand il entre en bouche le distillat NC’NEAN est frais, et un peu plus marqué en alcool que le nez ne le laissait imaginer, mais il reste assez doux.

 

Assez rapidement on note sur la langue l’arrivée d’épices qui étaient restés très discrets au nez. Il procure une douce sensation de velour dans la bouche.

 

Il va ensuite révéler des notes de bois vert plus marquées, qui viennent confirmer son côté floral mais également qui trahissent un peu sa jeunesse. Sur la fin de dégustation il se réchauffe se « mielle » et laisse, ça et là, apparaitre des pointes de réglisse.

 

 La finale est moyennent longue avec des notes boisées et fraiches avec des restes de cannelle et de réglisse plus persistantes que les autres.

 

Le verre vide reste frais et clairement porté sur l’orge et un côté « agricole » et une pointe de pèche (qui elle est bien persistante sur la durée).

 

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Ce whisky est une belle surprise de douceur dans un monde de brut. Il méritera certainement un peu de temps pour laisser le bois STR s’exprimer à plein mais il augure de belles chose sur la côte ouest de l’Ecosse. En plus il ne peut pas faire de mal il est complètement BIO (et donc bon pour la santé ).

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Commentaires: 1
  • #1

    Daniel Grossenbacher (samedi, 23 octobre 2021 23:13)

    J'adore cette philosophie ...