Dégustation ARDNAMURCHAN : AD/CK.364 17:11:14, AD/CK.371 30:07:15, AD CK.670 16:10:15

 

Un nouveau passage sur les terres écossaises de l’ouest sur la péninsule d’Ardnamurchan, là où les nouvelles expériences de whisky voient actuellement le jour.

 

C’est la troisième fois que nous venons ici (et à mon avis c’est loin d’être fini). La distillerie d’Ardnamurchan est désormais en rythme de croisière et vient même de sortir sa seconde version officielle le AD 01.21.01 (déjà victime de son succès), mais aujourd’hui, nous allons participer à des expériences de sorties de fûts. 

 

Pour se faire direction un des trois warehouses de la distillerie où nous avons rendez-vous avec Jenny K (pour l’anonymat) que l’on appelle déjà la « Dancey girl » ! Elle doit nous montrer l’étendue du savoir-faire des équipes de la distillerie en terme de finish. 

Arrivé dans le bâtiment, c’est tout sourire qu’elle nous reçoit et nous mène devant 3 fûts qui contiennent les dégustations du jour : un fût de champagne, un fût de bourbon et un gros fût de sherry oloroso. A coté, en terme de référence se trouve également la première vraie production de la distillerie le AD/09.20:01 (que nous avons déjà eu l’occasion de déguster ensemble).

 

Donc aujourd’hui, nous allons goûter des whiskies brut de fûts tourbés et non tourbés ! Attention aux yeux !

 

AD/CK.364

Sachant d’où je viens avec mon Brad Peat, Jenny commence la dégustation par un fût qui n’a rien d’un fût de whisky ! Le temps d’utiliser le tire bonde pour pouvoir laisser sortir quelques gouttes pour la dégustation, elle m’explique l’expérience.

 

Sur le fond du tonneau, comme de nombreux fûts ici, est noté ARDNAMURCHAN DISTILLERY, mais également 364 et 2014. Mais un autre nom apparaît : Paul LAUNOIS ! Je regarde Jenny et lui dit : « mais ça vient de mon pays ça ! C’est du champagne ? ».

 

Elle me dit alors qu’à l’instar de la distillerie, ces fûts –il y en a plusieurs dans un coin) ont été choisis par le maître de chais car ce producteur de champagne Du Mesnil sur Oger (entre Châlons-en-Champagne et Epernay –NDLR-) a une approche de la production assez similaire de celle d’une distillerie (à savoir la production de Champagne en fût unique).

 

Aussi, étant fin 2020 (au moment de cette aventure), le premier whisky qu’elle me fait goûter vient de passer 6 ans (puisque distillé en novembre 2014 –année de création de la distillerie –NDLR-) dans un fût de champagne !

 

Le liquide qui sort de la pipe et qui coule dans le verre est d’une belle couleur presque marron. Rappelons ici que le champagne bien qu’un vin effervescent n’en reste pas moins un vin, et que comme souvent les anciens fûts de vins ont tendance à bien colorer le distillat.

 

Et le distillat justement ! Comme nous l’avons déjà vu dans de précédentes dégustations, la distillerie en produit un tourbé et un non-tourbé. Et c’est ce dernier qui a été choisi ici pour transiter par ce fût de champagne (peut-être pour éviter de se retrouver avec une tourbe qui masquerait peut-être le travail d’affinage). C’est également par celui-ci que nous allons commencer pour éviter que notre palais ne soit trop « enfumé ».

 

Alors, alors, on en peut plus d’attendre, que donne le magnifique travail de la distillerie dans un fût de champagne !

 

C’est toujours un réel plaisir de goûter un whisky qui sort de son fût directement.

 

Quand le nez s’approche du verre, il va détecter le caractère vineux du distillat (un peu comme quand on s’approche d’une barrique de vin vide). Cependant, il va en être tout autre quand on va réellement plonger le nez dans le verre.

 

En effet, alors même que le whisky titre quand même à 58,2% d’alcool par volume, les premières sensations vont être douces avec un coté pâtissier très agréable. Cependant, que l’on ne s’y trompe pas le poivre monte au nez quand un inspire un peu trop ! Sortont avant que le nez ne prenne feu !

Au second passage, l’approche va être plus celle que l’on pourrait avoir avec un whisky « sherry » avec de belles odeurs de raisin et de fruits rouges (rappelons quand même une nouvelle fois que le champagne est un vin !).

 

Le troisième passage reste sur le fruit du verger (une pêche blanche par exemple) mais avec une pointe de fumée et de terre. Curieux quand on sait qu’on est sur une péninsule et qu’on pourrait s’attendre à un air marin ! Mais c’est peut-être là l’impact du vieillissement.

 

Le temps que Jenny souhaite bonne dégustation et voilà le distillat en bouche !

 

Ce whisky est une crème pâtissière. Quand il entre en bouche. Le premier ressenti ferait oublier son degré d’alcool. Mais que l’on ne s’y trompe pas là encore, la puissance surgit vite avec une puissante pointe de poivre qui se meut en âpreté assez rapidement. Ensuite les alizées de la côte ouest de l’Ecosse, se calment pour laisser la place à une surprennent fraise tagada.  Alors qu’on retourne en enfance avec le bonbon, les épices refont et viennent se poser sur le palais puis sur la langue. La sensation globale reste néanmoins épaisse et moelleuse, et fini sa route sur une note mielleuse.

 

Une fois avalé, le final est assez long et va laisser des notes citronnées et fraiches, accompagnées d’une pointe de fumée dans la gorge. Dans la bouche les restes du passage seront eux plus âpres (effet du fût de vin).

 

Quel début !

 

Vite passons à la tourbe !

 

AD/CK.371

Jenny nous présent le second fût du jour. Il s’agit d’un ex fût de bourbon de 180 l. Il porte le n° 371 et le whisky qui est dedans a été distillé fin juillet 2015 (notons ou rappelons ici le souci de précision et de traçabilité voulu par la distillerie). Le distillat (tourbé donc cette fois-ci) est resté 5 ans dedans. Mais attention il titre 59,2 % d’alcool.

 

L’objectif ici annoncé est de montrer la réalisation tourbée de la distillerie dans sa vraie nature et de la comparer avec ces confrères (rappelons que bien qu’actuellement il y ait une course aux différents types de vieillissement et de finish une grande partie des whiskies produits vieillissent en fût de bourbon).

 

Le liquide qui est versé dans le verre par Jenny est beaucoup plus clair que le précédent. Il présente néanmoins une couleur or légèrement foncée.

 

Alors la tourbe d’Ardnamurchan ?

Quand le nez s’approche du verre, il va détecter une douceur de caramel mais pas de tourbe.

Le moins que l’on puisse dire c’est que la force et la tourbe est maitrisée !

 

Au moment où le nez plonge dans le verre les odeurs qui ressortent sont paradoxalement douces et citronnées. On peut attribuée un caractère fermier à ce whisky. Il sent l’orge et la terre. Ce n’est qu’en restant dans le verre qu’on va enfin voir apparaitre la tourbe très discrète. Il fait preuve d’une grande fraicheur mais pas d’agressivité (malgré son degré).

 

Le second passage sera sous le signe des biscuits avec des arômes de vanille, mais comme s’il n’en pouvait plus de retenir sa force, le distillat lâche une grosse poignée d’épices.

 

Pour autant au troisième passage ils disparaissent et on retrouve son caractère agricole.

 

La tourbe est bien maitrisée et discrète. Il faut mettre quelques gouttes de distillat dans la main pour vraiment la sentir. Je vous l’annonce la tourbe d’Ardnamurchan ne sera pas celle d’Islay ou celle de Skye, ce sera celle d’Ardnamurchan (parole de PEATDREAM).

 

Et en bouche ?

 

L’entrée en bouche se fait en douceur sur des notes de gâteau. Bien entendu on détecte là une pointe de tourbe. Tout doucement, il s’ouvre et brule la langue avec ses épices mais les quasi 60 % de volumes sont maîtrisés. A peine le temps de le dire et les alizées se déchainent dans la bouche. Comme si de fortes vagues venaient frapper une ile, la langue qui sur la douceur du miel est cernées de toutes part par des notes iodées et des épices qui lui assènent des coups et lui dessèche les plages. Au moment où la tempête se calme une pomme tombe d’un arbre à cause d’un feu de de tourbe !   

 

Quand il est avalé, la finale est assez longue mais reste moelleuse et fraiche. On détectera la pointe de tourbe (on est là pour ça quand même) mais également au bout d’un moment un bâton de réglisse.

 

On en redemande car en vieillissant il devrait bien se révéler.

 

Et si on finissait par tourbe et sherry ?

AD/CK 670

Le dernier fût que nous présente Jenny est sensiblement plus gros que le précédent. Nous sommes désormais en Espagne avec un ex-fût Oloroso hogshead (250 l).

 

En toute logique, le distillat qui est dans notre verre se pare d’un magnifique couleur terra cota car il est quand même resté dans un fût de sherry pendant 5 ans (ca en marquerait plus d’un !). Nous avons sous les yeux un « sherry bomb » !

 

Avant de plonger le nez complètement dans le verre on sent du caramel et de suite qu’on sera sur une certaine chaleur fruitée. Au bout de quelques minutes on pourra même détecter une très légère tourbe.

 

En le plongeant plus à l’intérieur, le premier ressenti sera celui du fût et non celui du distillat. Ce whisky demande à s’ouvrir. Justement quand il est plus ouvert, on ne se trompera pas on sera sur un sherry bomb. Fruits rouges (cerises, fraises, raisin) et des épices au bout d’un moment.

 

Au second passage, très lointaine la tourbe se cache derrière les pruneaux et les clous de girofles.  

 

Le coté fruité reste assez présent au troisième passage avec une pointe marine qui fait son entrée vient rafraichir l’ambiance.

 

La tourbe est juste détectée par un passage dans le creux de la main.

 

En bouche, on détecte clairement les vieillissement sherry avec des cerises bien mures mais également et rapidement de l’âpreté. L’ambiance est malgré tout chaude et moelleuse. Des épices viennent piquer la langue avant de s’évaporer et laisser en bouche du miel. Un clou de girofle pique la gorge un instant pour disparaître et laisser la place à une pointe marine.

 

Il faut vraiment savoir que l’on a affaire à un whisky tourbé. Seule l’air au moment de l’entrée en bouche le montre et le final le montrent.

 

La finale justement est plus court que le précédent et laisse du moelleux et de la chaleur en bouche.

 

 

A l’inverse des deux précédents fûts, ce dernier vieillissement va être plus habituel, plus marqué sherry et moins marqué tourbe. Il faudra voir en vieillissant mais on a l’impression que le distillat d’Ardnamurchan se charge beaucoup en sherry. Personnellement je lui préfère la version 2019/AD (que nous avons déjà gouté ensemble) et qui « mélange les tourbés et non tourbés, sherry et bourbon…

 

Pour finir cette dégustation Jenny nous propose de prendre en référence le AD 01.21.01 (mais je vous laisse découvrir ici la dégustation que j’avais pu en faire).

 

 

C’est avec grand regret que je dois quitter la péninsule d’Ardnamurchan pour voler vers de nouvelles aventures.